Le groupe Le Clos est l’oeuvre du Chef japonais Isao Kuroiwa 黒岩 功 qui, après une formation à la cuisine française aux cotés de Jean-Michel Lorain et Gérard Besson, a créé son propre restaurant français à Osaka. Déclinant son concept avec Le Clos De Kuro et Le Clos de Mariage au Japon, il a maintenant décidé d’investir Paris. Pour cette première implantation française ouverte en janvier 2014 dans le 15ème arrondissement, Le Clos est allé chercher Yoshitaka Ikeda, un jeune Chef japonais déjà rompu aux techniques culinaires françaises. Passé, entre autres, par les cuisines du Guilo Guilo et du Taillevent, Yoshitaka Ikeda prend ainsi pour la première fois la casquette de Chef de cuisine.
Premières Impressions :
En février, j’avais été intrigué par la devanture flambant neuve de ce restaurant avenue du Maine. Je tente une recherche sur internet mais très peu d’informations sont disponibles. Un restaurant gastronomique parisien aurait-t-il osé se lancer sans l’une de ces agences de communication aguicheuses de journalistes-blogueurs (ou l’inverse comme vous voulez) ? Et bien oui ! L’explication tient peut-être à la magistrale décoration dont le budget n’a pas dû être anecdotique…
Imaginée par Daï Sugasawa, ex-acolyte de Philippe Stark, la décoration du restaurant joue la sobriété audacieuse. Au milieu d’une salle aux teintes grises et noires, les tables en bois apportent une belle chaleur. Alors qu’une trentaine de couverts étaient déjà disponibles sur la gauche, un comptoir de 11 mètres taillé dans un cerisier japonais permet à une dizaine de privilégiés d’assister à la préparation des entrées et des desserts. Sans hésiter, nous prenons place sur ce comptoir et n’auront de cesse d’admirer cette monumentale et envoûtante curiosité.
Au service, l’équipe est d’une efficacité et d’une gentillesse admirables. Souriante, disponible, précise, attentionnée, nous nous sommes littéralement faits chouchouter. Le tout jeune Maître d’hôtel y est d’ailleurs pour beaucoup dans ce sentiment de sérénité et de plaisir qui nous a accompagné pendant tout ce déjeuner. Un sans faute presque inédit pour un restaurant s’offrant à partir de 18 €…
La Carte :
Parlons justement de la Carte ! Au déjeuner, le menu entrée, plat, dessert s’affiche à seulement 25 € passant à 18 ou 20 € selon que l’on sépare de l’entrée ou du dessert. L’entrée est unique et se compose d’un assortiment de petites préparations à la façon d’un bento. Pour les plats, deux sont de viande et un de poisson. Les végétariens n’ont qu’à rester chez eux ! Saumon mi-cuit, asperges et sauce à l’orange, Confit de canard et lentilles vertes et Caille rôtie à la sauce japonaise. Sur les deux desserts, on retrouve cette cuisine française ponctuée de touches japonaises avec un Gâteau au chocolat à la royale et une Mousse au thé vert, haricot rouge et chocolat blanc. Toutes ces propositions me semblent bien engageantes et parfaitement à mon goût. Les énoncés sont très courts et laissent encore planer le mystère sur la nature réelle des assiettes. Notez enfin que le soir, Le Clos Y affiche trois menus de 38 à 60 € et de 3 à 8 plats … (J’en parlerai sans doute un autre jour !)
Le Repas :
Rappelant le dressage de table d’un certain BO London, Le Clos Y met à disposition aussi bien des baguettes que des couverts. Il faut dire que le concept japonais du Chef Isao Kuroiwa est justement de cuisiner des plats à la française de telle sorte qu’ils puissent être dégustés avec des baguettes. On retrouve donc en partie cette idée au Clos Y tout en admettant que les parisiens ne sont pas forcément encore prêts à abandonner leur bonne vieille fourchette !
Installés au comptoir, nous pouvons admirer l’exercice du dressage de l’entrée. Composée d’un Assortiment de petites bouchées, cette entrée demande un long travail de préparation et plusieurs petites mains s’affèrent pour ajouter une feuille de shiso par-ci et des œufs de saumon par-là. Même s’il est efficacement secondé, le Chef Yoshitaka Ikeda est au four et au moulin passant du comptoir à la cuisine où les plats sont cuisinés. Équipé d’une oreillette, il donne ses instructions à son équipe pour que tout soit parfait. On regrettera peut-être que malgré cet effort de transparence, le Chef ne soit pas plus en contact avec les clients. J’aurais aimé que ce soit lui qui nous explique ses plats et sa cuisine même si le maître d’hôtel s’en est chargé avec brio.
Quatre amuse-bouches disposés sur une ardoise ouvrent les hostilités ! Pêle-mêle, Mousse d’Oursin et Oeufs de harengs, Sashimi de Saumon, Sushi de Thon, Olives noires séchées et condiment glacé à la pomme verte et Mousse de Foie Gras, Espuma d’eau de tomate et coulis de fraise. Par quoi commencer ? Certaines bouchées sont simples mais très bien rehaussées par de puissants condiments. D’autres sont plus originales mais tout aussi réussies comme avec l’association du Foie gras, de la tomate et de la fraise. Très belle sensation avec le Sushi de Thon mi-cuit trempé dans le sorbet de pomme verte. C’est frais, sucré et délicat, j’ai adoré ! Le jeu du bento à la française était risqué mais le Chef Yoshitaka Ikeda s’en sort avec les honneurs.
Attention là, on rentre dans le dur avec ce Saumon d’Ecosse mi-cuit, Asperge verte, confit d’oignon et sauce à l’orange. L’assiette est juste magnifique. Élégante, colorée et brillante, elle renvoie à un travail d’orfèvre. Le Chef pousse le vice jusqu’à couronné sur oeuvre d’une peau de saumon divinement croustillante. La réalisation surclasserait presque cet esthétisme parfait. Chaque élément est maîtrisé à la perfection autant dans la cuisson que dans l’assaisonnement. Le Chef Yoshitaka Ikeda n’est pas de ceux qui nous violentent avec des amertumes ou acidités extrêmes. Lui joue avec finesse et enchante les palais sans dénaturer le produit vedette.
Cette Caille rôtie, Asperges sauvages et Sauce à la japonaise convainc avec rigoureusement les mêmes arguments. La sauce crémeuse caresse des cuisses de caille fondantes tandis que les pointes de ses fines asperges croquent doucement sous la dent.
À l’image des entrées, les desserts font l’objet d’une attention particulière et méticuleuse. Avec des assiettes complexes et intelligentes, le Chef se démarque des codes de la bistronomie parisienne et de ses compatriotes cuisiniers nippons. Mousse de thé vert, Mousse d’haricot rouge, Nougat glacé d’abord et Gâteau au chocolat à la royale, Mousse de chocolat blanc et Sorbet Framboise ensuite. Pêché de gourmandise, les deux assiettes sont complétées avec une part de tarte frangipane et framboise. Certains pourraient y voir un léger manque de cohérence. J’y vois plutôt un excès de générosité. De toute façon, tout le monde sera mis d’accord grâce à la qualité de chacun des éléments, du sorbet au nougat en passant par les onctueuses mousses idéalement dosées.
Bilan :
Faut il y aller ? Décrochez sans attendre votre téléphone pour réserver au Clos Y ! Transporté par la décoration, le service et la cuisine du Chef Yoshitaka Ikeda, l’expérience gourmande au Clos Y s’apparente à un voyage singulier hors du temps.
Avec qui ? Seul au comptoir, à l’écart en amoureux voir en groupe dans la salle prévue à cet effet, toutes les circonstances se prêtent à un repas au Clos Y.
Y retourner ? Plutôt deux fois qu’une !
La clientèle ? Hétéroclite et pas guindé pour un sous. Le midi, surtout des cols blancs, le soir, les habitants du quartier.
C’est cher ? Le menu déjeuner à 25 € est imbattable tellement les assiettes sont sophistiquées et gourmandes. Si vous ajoutez à cela le cadre et le service enchanteurs, vous avez votre tiercé gagnant ! Le soir, on commence à partir de 38 € pour 3 plats. Encore une très bonne affaire.
Et les toilettes ? Majestueux.
Informations :
Le Clos Y
27 Avenue du Maine – Paris 15ème
Métro : Falguière
Tél. : 01.45.49.07.35
www.le-clos.jp/paris
Ouvert du Mardi au Samedi de 12h à 14h et de 19h30 à 22h et le Dimanche de 19h30 à 22h.